Lutte contre la pauvreté
La mesure de la gouvernance et de la démocratie dans le cadre des stratégies actuelles de lutte contre la pauvreté constitue un défi majeur. L’enjeu est de taille sachant que les informations disponibles concernant les points de vue et les comportements de la population sur ces thèmes sont quasiment inexistants en Afrique sub-saharienne.
Dans un contexte de consolidation du processus de démocratisation qui a été enclenché dans de nombreux pays de ce continent, et à l’heure où une attention particulière est accordée à la participation citoyenne, il s’avère nécessaire d’établir un diagnostic sur la gouvernance, la démocratie et la lutte contre la pauvreté, en partant de la perception de la population.
Les multiples dimensions de la pauvreté
Comment appréhender la notion de pauvreté ?
La pauvreté est un phénomène complexe. Si globalement la pauvreté peut se définir comme une situation où les besoins ne sont pas satisfaits, deux questions se posent : quels types de besoins doivent être pris en compte ?
Quel est le niveau que l’on peut considérer comme satisfaisant ? Une attention particulière doit être accordée à la pauvreté subjective, c’est-à-dire la perception de la population de ses conditions de vie, chaque individu ayant ses propres critères pour se déclarer satisfait ou non par rapport aux besoins qu’il estime vitaux.
Mais il convient de souligner que plus les individus sont démunis du point de vue monétaire, plus ils mettent en avant les différentes dimensions de la pauvreté. En effet, ils sont relativement plus nombreux parmi le quartile des revenus les plus faibles (comparé aux quartiles plus riches) à caractériser la pauvreté par diverses formes telles l’incapacité à influer sur ses conditions ou la marginalisation/exclusion.
Les pauvres cumulent un certain nombre de privations selon des critères objectifs
Même si les différences ne sont pas très marquées, la probabilité de souffrir de mauvaises conditions de logement est plus élevée chez les ménages à faible revenu. Pour le quartile le plus pauvre en termes monétaires, 20% ne sont pas raccordés à l’électricité (contre 7% pour le quartile des plus hauts revenus). Par ailleurs, le nombre moyen de personnes par pièce varie fortement passant de 1,6 à 2,6 du quartile le plus riche au plus pauvre. La promiscuité est ainsi plus forte chez les plus démunis. Concernant le capital humain, la durée de la scolarisation varie de manière importante suivant le niveau de revenu. Ainsi, le nombre moyen d’années d’études passe de 3,8 à 7,7 du quartile le plus pauvre à celui le plus riche. Du point de vue de l’intégration sociale, aucune différence significative ne peut être décelée entre le quartile de revenu le plus pauvre et le plus riche concernant le degré d’insertion dans les associations (ceux qui n’appartiennent à aucune association représentent respectivement 31% et 34% pour le premier et le dernier quartile). Mais si on considère le suivi régulier des nouvelles comme une condition pour mieux s’insérer ou participer à la vie sociale et politique, on constate que le quartile des plus pauvres monétairement est relativement plus défavorisé avec 45% seulement des ménages qui déclarent suivre régulièrement les informations (contre 64% pour le quartile des plus riches).
La perception de la vulnérabilité : Plus d’un tiers des individus (37%) déclare que les revenus de leurs ménages sont très instables et qu’ils vivent ainsi dans un climat d’incertitude. Le pourcentage correspondant est de 55% pour le quartile des plus démunis. Même pour le quartile le plus riche, plus d’un individu sur cinq (19%) estime que la stabilité de ses revenus n’est pas assurée.
Les inégalités sont plutôt faiblement ressenties
Pour la capitale sénégalaise, il s’avère que 12% seulement des individus estiment faire partie du quintile des plus pauvres. Cette proportion atteint 20% parmi ceux du quartile des plus démunis du point de vue monétaire. En fait, une grande partie de la population de Dakar pense qu’elle se situe dans la frange des moyennement pauvres (33%) ou dans la moyenne (49%). Ces constats sont plutôt positifs puisqu’ils révèlent que les inégalités sont assez faiblement ressenties par une large part de la population, même si un individu sur huit exprime un véritable sentiment d’exclusion.
Une approche plus globale : la perception des ménages de leur bien-être
L’appréciation globale de la population est assez mitigée. Ceux qui se sentent pleinement heureux de leur situation ne constituent qu’une faible minorité (10%). Au total, environ 48% des Dakarois s’estiment plus ou moins satisfaits en termes de bien-être. On peut adjoindre à ce groupe les 24% d’individus qui expriment une relative satisfaction tout en soulignant que leurs ménages ne sont pas à l’abri des difficultés. Il reste 28% qui déclarent vivre difficilement et qui sont ainsi à classer dans la catégorie des pauvres. Plus de 40% dans le quartile des plus faibles revenus mettent en exergue la grande précarité de leurs conditions. Il convient toutefois de noter que six ménages sur dix de ce dernier quartile ne s’estiment pas pauvres selon cette approche subjective.
Une évaluation par la population de l’efficacité des politiques de lutte contre la pauvreté
Le consensus est massif avec 97% des habitants de la capitale qui s’accordent sur le caractère prioritaire de la réduction de la pauvreté. Mais lorsqu’on sollicite la population pour évaluer la pertinence des politiques mises en oeuvres en termes de lutte contre la pauvreté, le bilan est assez mitigé. 70% estiment que ces dernières donnent quelques résultats. Mais ils ne sont que 30% à être réellement convaincus de l’efficacité des politiques. Les plus pauvres – censés être les principaux bénéficiaires des politiques – doutent autant que le reste de la population sur les résultats de la stratégie mise en oeuvre.Pour conclure sur ce chapitre, l’analyse des liens entre les différentes formes de pauvreté montre qu’elles sont faiblement corrélées entre elles.Ce constat plaide pour la mise en oeuvre de politiques ciblées spécifiques à chaque forme de pauvreté.
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